25 février 2012

A la lettre - En direct des bibliothèques

Sic

La revue Proa (2ème époque), dirigée à Buenos Aires par Jorge Luis Borges, Brandán Caraffa, Ricardo Güiraldes et Pablo Rojas Paz, publiait dans la « Crónica de libros » de son numéro 15, de janvier 1926 (p.59-60), une note bibliographique ainsi libellée :

« Pan Brazil Canción Eurodeo Swald de Andrade. Escrito en portugués. San Breil, Paris. »

Qui, des lecteurs argentins d’alors, aura pu comprendre qu’il s’agissait du recueil de poèmes Pau Brasil, sous-titré Cancioneiro de Oswald de Andrade, imprimé à l’enseigne du Sans Pareil à l’été 1925 ?

Cette bien malencontreuse transcription tend à montrer que le bibliographe anonyme (et hispanophone) n’a pas une très nette idée de l’identité de l’auteur, et qu’il n’est guère allé au-delà de la page de titre (ci-après reproduite), fourvoyé par sa disposition et à quoi il ajoute quelques coquilles :


Elle demeure néanmoins la seule trace connue de la réception alors réservée, hors Brésil, à la parution de ce recueil fondamental pour le Modernisme brésilien. Même à Paris, où le volume fut publié, aucun écho, note bibliographique ou recension critique, n’a été à ce jour identifié par les chercheurs.

C’est pourtant bien l’origine parisienne, certes quelque peu empruntée, du livre d’Oswald de Andrade, qui explique la discrète présence d’Oswald de Andrade dans l’un des organes de l’avant-garde argentine, plutôt que d’improbables liens, qui n’existaient aucunement alors, entre les nouvelles générations de São Paulo et de Buenos Aires : on sait que Proa entretint des liens importants (matérialisés par des collaborations françaises à son sommaire) avec Valery Larbaud, Jules Supervielle et le cercle de la libraire Adrienne Monnier, ou encore l’Espagnol Ramón Gómez de la Serna, c’est-à-dire une partie des connaissances parisiennes d’Oswald de Andrade, lesquelles ont dû communiquer l’information irrémédiablement compromise, in fine, par un typographe capricieux et plus encore par une lecture très superficielle…