21 février 2015

Revolução ! / Lancement Pagu (18)

Olga/Pagu
Deux héroïnes de la Révolution
dans le Brésil des années 1930

ÉTOILE FILANTE : météorite dont le passage dans
l’atmosphère terrestre se signale par un trait de lumière.
(Le Petit Robert)

Elles ne se sont jamais connues, mais presque croisées — dans la clandestinité ou en prison. Leurs trajectoires exemplaires, également fulgurantes, quoique singulièrement tragique pour l’une, ont cette contiguïté qui interpelle, dans le temps et l’espace, en gravitant autour d’un même homme, Luís Carlos Prestes.
Lorsqu’en 1931 la jeune activiste Pagu (Patrícia Galvão, 1910-1962), membre du PCB, approche à Montevideo le grand héros révolutionnaire en exil, celui-ci est encore seul, mais ils luttent déjà pour la même cause. Lorsqu’elle traverse l’URSS, en 1934, pour rejoindre le Paris du Front populaire, elle ignore peut-être qu’il se trouve à Moscou, promu au sein de l’Internationale Communiste où il rencontre l’agente allemande Olga Benario (1908-1942). Lorsqu’elle regagne le Brésil au temps de l'ANL, en 1935, Prestes et sa compagne un peu spéciale viennent d’y débarquer eux-mêmes clandestinement pour fomenter une insurrection. Celle-ci échoue et déclenche une répression massive qui les emportera tous trois, début 1936, dans les geôles de la police politique… L’une avait dabord manqué d’être remise à l’Allemagne nazie par la police de Laval, comme militante communiste étrangère, rapatriée qu’elle fut par un ambassadeur humaniste ; l’autre, juive, fut enfin livrée à la Gestapo par la police de Vargas, et gazée.
Deux tempéraments féminins dans l’histoire, deux mères séparées de leur enfant, deux martyres de la cause révolutionnaire prises dans les filets du fascisme international, deux destins fracassés, enfin, qui furent un lendemain chantant bien cruellement après la promesse, justement, du « roman prolétaire » lancé par Pagu en 1933, Parc industriel, à paraître au Temps des Cerises.
On peut donc lire, en attendant, le grand récit du journaliste Fernando Morais, Olga, paru en 1985 au Brésil, traduit en français en 1990 et tout récemment revu et réédité :

Fernando Morais
Olga
Allemande, Juive, Révolutionnaire
Trad. du portugais (Brésil)
d’Antoine Albuca,
revue, préfacée et annotée
par Gérard Siary
Chandeigne, « Bibliothèque Lusitane »,
janvier 2015, 454p., 22€

Une étoile filante…
Fille de la bourgeoisie juive allemande, Olga Benario déploie une volonté inouïe pour devenir la militante la plus dynamique des Jeunesses Communistes dans le Berlin des années Vingt. Ensuite, agente de la IIIe Internationale à Moscou, rompue à l’exercice des armes, la voilà chargée d’escorter au Brésil le militant Luís Carlos Prestes, légende en son pays, pour faire tomber la dictature du président Getúlio Vargas. Olga et Prestes tombent amoureux.
Las, l’échec de la révolte de novembre 1935, à Rio de Janeiro, jette les deux amants en prison. Olga est alors enceinte de l’enfant conçu au Brésil avec Prestes. La loi du Brésil interdit de l’extrader. Mais le pouvoir livre Olga, juive et communiste, à l’Allemagne nazie. Déportée à Ravensbrück, enfermée au bloc juif, elle sera gazée. Cette révolutionnaire impavide, ni brisée ni bridée, n’aura eu de cesse, en sa courte vie, d’œuvrer au triomphe de son idéal. Un modèle héroïque au féminin, oui, mais aussi, simplement, un être humain enjoué, disponible, passionné, vaillant…
Avec ce récit politique haletant qu’il a mis cinq ans à écrire, Fernando Morais, grand journaliste, ne nous conte pas seulement le destin fulgurant d’une pasionaria brésilienne. Il nous plonge surtout dans l’histoire fascinante, aux ramifications internationales, qui se joue entre la Russie, l’Europe et les Amériques du sud des années Trente.
[4e de couverture]


N.B. : Fernando Morais (qui est aussi le biographe de Paulo Coelho, que voulez-vous), sera parmi les 48 auteurs brésiliens invités au Salon du Livre de Paris (20-23 mars) dans le cadre de la programmation « Le Brésil à l’honneur ».

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